Bon alors un peu hésitante, pas vraiment confiante, je vous propose mon texte pour ce défi écriture.
C'est drôle de voir comme les mots ne suivent pas toujours l'idée. J'avais pensé à ça et finalement ça a donné ça... Je sais pas trop, c'était pas facile. Pour la petite histoire, je me suis demandé "qu'est ce qui pouvait pousser à la haine ?" Je ne crois pas qu'on déteste, haisse quelqu'un comme ça, sans vraie raison, qu'on en soit conscient ou non, il doit bien y avoir un élément déclencheur, plus ou moins valable.
Dc ben mon texte. Et en fait écrire au futur, c'est très compliqué. J'ai dû m'embrouiller les pinceaux à pas mal d'endroit
Bonne lecture, enfin j'espère.
« Chère Sandra,
Le 22 Juin 2010 sera le plus beau jour de ta vie. Tu t’avanceras dans l’allée plus belle que le jour, plus rayonnante que le soleil sous les regards émerveillés de tous tes proches. Ton frère aura fait spécialement le déplacement de New York pour ce jour si spécial. Il versera même une larme quand tu prononceras tes vœux, jurant de t’unir pour le meilleur et pour le pire à celui qui le cœur battant à tout rompre ne pourra s’empêcher de penser que c’est le plus beau jour de sa vie.
Vous habiterez une petite maison dans un quartier paisible. Il travaillera dans un grand cabinet, tu feras le métier dont tu auras toujours rêvé. Les enfants t’adoreront. Et lui, tu l’aimeras. Tu l’aimeras de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton être. Tu l’aimeras comme tu n’as jamais aimé personne. Tu l’aimeras plus que tout au monde. Tu l’aimeras plus fort qu’il n’existe de mots pour le décrire. Tu l’aimeras tant que ce jour de décembre 2011, quand tu recevras ce coup de fil t’annonçant qu’il a eu un accident, tu croiras mourir…
Tu resteras des jours entiers et des nuits sans fin à son chevet, priant pour qu’il te revienne enfin, pour qu’il trouve la force de se réveiller. Tu maudiras sa passion pour les motos. Tu maudiras la neige qui tombait ce soir-là. Tu ne seras plus tout à fait toi.
Il se réveillera.
Il ne sera plus tout à fait lui. Tu seras là à chaque instant où il aura besoin de toi, même quand il te repoussera. Il devra tout réapprendre. Il se considéra comme un monstre. Comme un moins que rien. Il jurera qu’il aurait préféré mourir. Tu ne l’abandonneras pas. Pour lui, tu trouveras toujours un peu de force en toi. Tu l’accompagneras, pas après pas, main dans la main.
Vous sortirez de cette épreuve plus forts mais plus tout à fait les mêmes.
Quand tu lui annonceras que tu attends un enfant, il sera l’homme le plus heureux du monde. Il se montrera aux petits soins pour toi chaque jour de ta grossesse. Il pleurera le jour où tu mettras votre fils au monde. Il t’avouera alors qu’il est heureux d’avoir survécu. Il te remerciera d’être entrée dans sa vie. Il te dira que le bébé et toi êtes ses plus beaux des trésors, sa plus belle des joies, son bonheur absolu. Et tu l’aimeras encore un peu plus.
Le soir du Nouvel An, tu porteras une de tes plus belles robes : un cadeau de ton mari. Ses collèges ne cesseront de te complimenter. Tu riras. Tu danseras. Tu t’amuseras. Tu te diras que tu es une femme chanceuse et heureuse. Tu t’éclipseras pour te refaire une beauté. Les toilettes du rez de chaussée étant occupées, tu monteras à celles de l’étage, près du bureau de ton mari. Tu entendras des bruit provenant de celui-ci. Tu t’interrogeras. Tu te sentiras bête, mais les gémissements redoubleront. Tu t’avanceras comme un automate. Tu pousseras la porte. Tu te figeras. Les longues jambes de Stéphanie entourant la taille de ton mari. Le pantalon baissé. Sa poitrine découverte. Va-et-vient. Gémissements. Un flot de dégoût se répandra sur la moquette.
Tu t’enfuiras avec ton fils chez Rachel, ta meilleure amie. Il te téléphonera, t’enverra des mails, des sms. Te fera porter des fleurs, tes gourmandises préférées. Il t’écrira des lettres. Il te demandera pardon un millier de fois. Tu refuseras de lui parler. Tu n’auras pas le courage de lui faire face. Tu auras mal. Très mal. Ton cœur sera comme pétrifié alors que la seule image qui hantera ton esprit sera celle de ses mains palpant l’opulente poitrine de sa secrétaire, de ses va-e-vient en elle, de ses gémissements de plaisir. Tu pleureras tous les jours. Tu ne trouveras pas le sommeil. Tu ne comprendras pas comment ça a pu arriver. Tu ressasseras sans cesse ces derniers mois avec lui. Tu ressasseras vos nuits d’amour. Cherchant ce qui aurait cloché. Le pourquoi de cette trahison. La raison de cette douleur.
Tu souffriras. Tu ne vivras plus. Tu ne seras plus toi.
Tous les jours, il sonnera à la porte de Rachel, suppliant pour que tu acceptes de le voir, de l’entendre. Un jour, il viendra sur ton lieu de travail. Tu le repousseras mais il insistera. Il te forcera à l’écouter. Il t’expliquera pour lui et elle. Il te parlera de l’accident qui le hante encore, de ses craintes d‘avoir trop changé, trop faibli. Il te parlera d’elle qui l‘admirait, qui le désirait. De cette nuit où il a cédé. De cette nuit où il t’avait vue si belle, si admirée, si courtisée. Toi qui pourtant sa femme paraissais si inaccessible, si lointaine. Il te confiera ses doutes. Et si tu méritais mieux que lui ? Et s’il ne te méritait pas ? Et s’il n’était plus à la hauteur ?
Ses mots te feront l’effet de coups de poignard. Tu ne pourras t’empêcher de lui dire que tu l’aimais, que tu n’étais pas inaccessible. Qu’il était tout pour toi. Il te dira que c’était une erreur. Il te dira que c’était une faiblesse. Il éclatera en sanglots, se mettra à genoux, te suppliera de lui pardonner. Il clamera que sans toi, la vie n’a plus de saveur. Qu’il sait qu’il a tout gâché mais qu’il ne peut pas vivre sans toi. Qu’il ne peut pas te perdre. Il te répétera qu’il t’aime, qu’il n’y a que toi. Que tu es la seule et unique.
Tu céderas. Tu lui pardonneras.
Rachel te mettra en garde. Tu ne comprendras pas sa réaction. Vous vous disputerez mais vous vous réconcilierez bien vite. Elle se promettra de toujours veiller sur toi et de garder un œil sur ton mari.
Les mois passeront et votre vie sera belle à nouveau.
Tu attendras un deuxième enfant, une petite fille. Un soir, empêtrée dans une montagne de linge sale, tu tomberas sur une carte de visite dans une poche de son pantalon. Un baiser rouge marqué. Tu paniqueras. Tu iras le confronter. Tu lui balanceras la carte au visage. Tu lui demanderas de s’expliquer. Il ne comprendra pas. Tu t’énerveras. Il te dira que la carte était pour John, un collègue. Que la femme est une avocate qui travaille dans un autre cabinet, qu’elle voudrait recruter John mais qu’il n’est pas intéressé. Il avait pensé que lui le serait. La paye serait tellement supérieure. Il te dira que ce n’était qu’un coup de pouce pour sa carrière. Tu l’écouteras. Tu ne le croiras pas. Il tentera de te rassurer. Tu feindras de l’être, épuisée.
Tu appelleras John en cachette pour savoir la vérité. Il te racontera la même histoire que celle de ton mari. Mais tu ne sentiras pas soulagée. Tu te sentiras mal et perdue. Et chaque jour, un peu plus.
Quand il t’appellera pour dire qu’il rentre plus tard que prévu, tu paniqueras. Discrètement, tu fouilleras ses poches, tu vérifieras son portable, et tu culpabiliseras. Parce que ce ne sera plus toi. Parce que tu l’aimeras mais que tu angoisseras. Chaque jour, un peu plus. Tu ne seras plus entière. Et il le ressentira. Il cherchera à te rassurer, à te reconquérir. Il t’amadouera. Tu oublieras… Un peu…
A sept mois de grossesse, le portable de ton mari sonnera. Sans réfléchir, sans chercher, tu décrocheras. Ce sera une femme à l’autre bout du fil. Les seuls mots qu’elle prononcera seront « Chéri… ». Tu raccrocheras. Tu t’affaleras sur le lit.
Il sortira de la salle de bains, une serviette autour de la taille, les cheveux ébouriffés et étrangement tu le trouveras beau, plus beau que jamais. Il te regardera amoureusement, s’approchera, te dira qu’il a beaucoup de chance et à quel point tu es belle. Il t’embrassera comme il sait si bien le faire. Tu le laisseras faire. Tu ne le repousseras pas. Il te fera l’amour.
Tu resteras longtemps allongée près de lui, à le regarder, sans comprendre. Sans rien saisir.
Plus tard, tu lui poseras la question.
Il te regardera avec ce regard éberlué, cet air incrédule. Et alors pour la première fois, tu sentiras ce nœud dans ton estomac se resserrer et ce flot amer gonfler ton cœur. Pour la première fois, son sourire amoureux et ses yeux tendres remonteront en toi l’acide du dégoût. Ses mots d’amour bourdonneront à tes oreilles, insupportables. Tes ongles s’enfonceront dans ta chair. Ton cœur battra vite, si vite. Tu sentiras une envie d’hurler, de tout massacrer parcourir avec violence tout ton être. Faire trembler tes membres. Il voudra s’approcher de toi et ta main partira. Elle heurtera avec rage sa joue mal rasée.
Il sera surpris. Il prendra ça d’abord avec un sourire décontenancé puis voyant l’éclat dans tes yeux, son attitude changera. Ses traits se durciront. Dans son regard une lueur méconnue s’allumera. Il ne prononcera que quelques mots « Je vais oublier ça. » puis il partira travailler.
Ce feu inconnu, violent qui brûlera en toi t’animera toute cette journée. Tu ne pourras pas rester tranquille. Tu fouilleras ses affaires, ses vêtements, ses dossiers, consulteras ses mails. Rien ne pourra t’arrêter. La maison se transformera en vrai foutoir. Tu ne trouveras rien. Rien du tout.
Quand il rentrera ce soir-là, il te trouvera assise en plein milieu du salon à éplucher ses factures de portable. Il te demandera ce que tu fabriques. Tu lui jetteras les factures à la face en le traitant de menteur, de salaud parce que tu auras enfin trouvé la preuve. La preuve qu’il te fallait. Il refusera de te répondre. Tu t’énerveras. Le feu bouillonnant en toi et ton cœur gonflé de rancœur, tu insisteras. Tu voudras la vérité. Son silence te mettra hors de toi. Tes mains s’abattront sur son torse avec force. Une fois. Deux fois. Tu crieras qu’il te dise la vérité. Il restera impassible. Tu continueras. Tu le gifleras. Une fois. Deux fois. Ses yeux s’enflammeront. Il saisira ta main. Ses doigts se refermeront sur ton poignet. Il te demandera d’arrêter ce cinéma. Toi, toi, tu ne comprendras pas. Tes yeux dans les siens seront submergés de larmes. Ton cœur dans ta poitrine sera comme poignardé. Tu lui poseras une nouvelle fois la question. Il n’y répondra pas.
Alors quelque chose éclatera dans ta poitrine.
En une seconde, tu te souviendras de tout : de votre rencontre, de vos rendez-vous, de votre mariage, de votre bonheur, de ses mots d’amour, de ses gestes tendres, de ses promesses et de ses trahisons, du mal qu’il t’aura fait, de cette nuit où tu l’auras surpris avec sa secrétaire, de ses nuits à pleurer, à avoir l’impression d’étouffer, de ses jours à vivre dans l’angoisse, de ses cauchemars incessants, de cette souffrance, de cette douleur, de cette agonie.
Doucement, il approchera sa main de ta joue. Doucement, il caressera ton visage. Et tout ce que tu ressentiras ce sera de la haine.
La haine pour cette main sur ton visage. La haine pour son amour dans ses yeux. La haine pour les mots qu’il prononcera. La haine pour lui, tout entier.
Tout ton corps se contractera. Comme si il cherchait à se refermer. Comme si une force te poussait loin de lui. Comme si le voir, l’entendre, respirer le même air étaient devenus insupportables, une véritable torture. Comme si ton instinct de survie s’éveillait pour fuir la menace : lui.
Tu le repousseras. Tu te dégageras. Tu le dévisageras un moment. Mais tout ce que tu verras ne sera que haine. Il aura été amour. Il sera devenu haine.
Alors tu fuiras… »
Elle repose le crayon près de la lettre. Cette lettre qu’elle n’enverra jamais. Cette lettre qu’elle aurait aimé recevoir un jour. Peut-être. Peut-être pas. A vrai dire, elle ne sait pas.